Pendant les premiers jours de la première période de confinement, les chiffres se multipliaient, aussi bien sur le front sanitaire que sécuritaire. 3,7 millions de contrôles et 225 000 contraventions entre le 17 et le 26 mars, dans toute la France ; 144 000 contrôles et 1960 verbalisations en Ille-et-Vilaine après 18 jours de confinement ; 4500 contrôles et 65 verbalisations à Mende, en Lozère, entre le 17 mars et le 7 avril…
Une fois le confinement terminé, des questions se posent sur l’égalité de traitement des différents territoires. Laurent Nuñez déclare, le 29 mai 2020, dans Libé, au sujet des chiffres des verbalisations : « Est-ce que nous avons vocation à les rendre publiques ? Ce n’est pas certain. (…) Il n’y a eu ni restriction dans les contrôles ni zèle dans certains territoires, je peux vous l’affirmer. Nous avons le détail par département. Ces chiffres n’ont rien de secret. »
Puisqu’ils n’avaient rien de secret, je les avais demandé dans la foulée au ministère de l’intérieur. Il a fallu un avis de la CADA, et un recours devant le tribunal administratif (toujours en cours) pour avoir une réponse, arrivée hier dans ma boîte mail. Il s’est passé plus d’un an entre ma demande et leur réponse.
« Veuillez trouver en pièce jointe de ce mail les informations demandées à la suite de votre sollicitation CADA, à savoir le nombre de verbalisations par département effectuées lors de la première période de confinement », m’indique le service presse, sobrement, joignant un fichier Exel.
Les chiffres communiqués montrent que près d’1,2 million d’infractions ont été relevées par la police et la gendarmerie (et sûrement quelques policiers municipaux) entre le 17 mars et le 10 mai 20201.
Au niveau local, on note quelques disparités : dans les Alpes-Maritimes, en Seine-Saint-Denis, à Paris et à Mayotte, il y a eu plus de 30 infractions pour 1000 habitants, quand la moyenne nationale est autour de 17,8 infractions pour 1000 habitants. Au contraire, dans certains département très ruraux, comme la Lozère, il n’y a eu que 8 infractions relevées pour 1000 habitants (605 en tout sur l’ensemble du département).
Ces chiffres ne dressent pas un classement des départements les plus désobéissants pendant la première période de confinement, mais sont avant tout un reflet de l'activité policière.
On pourrait aussi les relativiser par rapport au nombre de contrôles effectués. Libé et Le Parisien avaient obtenu ces chiffres pour quelques départements franciliens, qui montraient, là encore des disparités : en Seine-Saint-Denis, à la fin du mois d'avril, 17% des contrôles menaient à une verbalisation, contre 6% à Paris. Le Parisien voulait y voir « les bons et mauvais élèves », Libé en concluait que les pratiques policières différaient d'un département à l'autre.
Au-delà du nombre de contrôles effectués par département, et pour poursuivre l'analyse, on pourrait aussi avoir le détail par infraction, comparer avec le nombre de forces de sécurité (policiers ou gendarmes) dans chaque département...
Autant d'informations qui permettraient de mieux comprendre le travail des forces de sécurité, et de vérifier la déclaration de Laurent Nuñez, qui disait, toujours dans Libé, qu'il « n’y a eu aucune stigmatisation dans les contrôles : ils ont porté partout de la même façon sur l’ensemble du territoire ». Les premiers chiffres communiqués montrent que ce n'est pas vraiment le cas.
1 Les chiffres concernent les infractions relevées, enregistrées par le Centre national des traitements, entre le 17 mars et le 10 mai 2020, par département parmi ces différentes infractions (NATINF 33465 à 33481, sauf 33468) relevées pendant le premier confinement (17/03/2020-10/05/2020) : déplacement hors du domicile interdit, déplacement sans document justificatif conforme, violation d'une mesure préfectorale, circulation dans un lieu interdit, circulation à une heure interdite, non-respect d'une mesure de mise en quarantaine ou d'isolement, ouverture d'un établissement recevant du public ou d'un lieu de réunion malgré une mesure de fermeture temporaire, rassemblement ou réunion interdite, plusieurs infractions liées aux prix réglementés et à l'entrave au fonctionnement du dispositif de santé et enfin, réitération dans un délai de 15 jours de violation d'interdiction ou obligation...
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